L'ordre cistercien

À la fin du XIe siècle, un nouvel ordre monastique voit le jour en France : celui des Cisterciens, qui s’étend rapidement bien au-delà des frontières de la France.
Au point d’exercer une influence religieuse, politique et économique dans toute l’Europe du Moyen Âge.

Un système de filiation fécond

Face à l’afflux de vocations à Cîteaux, Étienne Harding envoie une colonie à La Ferté (Saône-et-Loire) pour y fonder une abbaye en 1113, puis une autre à Pontigny (Yonne) en 1114. C’est ainsi qu’en 1115, il confie au jeune Bernard, entré deux ans plus tôt à Cîteaux avec plusieurs membres de sa famille, la création d’une abbaye à Clairvaux. Une autre voit le jour à Morimond (Haute-Marne) la même année.

Les quatre premières abbayes-filles de Cîteaux donnent elles-mêmes naissance à de nombreuses autres colonies soit par filiation directe, soit par rattachement, conformément à la Charte de charité rédigée par Étienne Harding vers 1120. Ce système d’abbayes-mères et d’abbayes-filles fonctionne si bien qu’en 1250, 651 abbayes cisterciennes sont recensées en Europe, dont les trois quarts hors de France.

D’après cette charte, les moines cisterciens élisent librement leur abbé, qui assure l’administration temporelle et spirituelle de l’abbaye. L’ensemble des abbés rend compte de son action chaque année à Cîteaux lors du Chapitre général, remplacé à la fin du XIIe siècle pour des raisons pratiques par le Définitoire, constitué uniquement des représentants des cinq filiations principales.

 

Miniature sur parchemin datant du XIIIe siècle et montrant la fondation des quatre premières abbayes filles de Cîteaux. © Cambridge University LibraryMiniature sur parchemin datant du XIIIe siècle et montrant la fondation des quatre premières abbayes filles de Cîteaux. © Cambridge University Library

 

 

Fondation de l’abbaye de Cîteaux

La création de l’ordre cistercien remonte à la fondation de l’abbaye de Cîteaux (Côte-d’Or) en 1098 par Robert de Molesme, inspiré par la réforme grégorienne. Rejetant le modèle clunisien, Robert souhaite revenir à une observance stricte de la Règle de saint Benoît : une vie en communauté isolée faite de prière, de travail manuel et d’austérité.

Avec son prieur, Étienne  Harding, il quitte avec fracas l’abbaye de Molesme (Côte-d’Or), dont il était l’abbé, pour s’installer avec des frères bénédictins dans un domaine donné par le vicomte de Beaune et le duc de Bourgogne, au sud de Dijon. La fondation de l’abbaye de Cîteaux est approuvée en 1100 par le pape Pascal II, qui oblige toutefois Robert à reprendre ses fonctions à Molesme. Le nouveau monastère grandit rapidement grâce à l’action d’Étienne  Harding, abbé de Cîteaux jusqu’en 1133, qui accroît son domaine foncier et accueille un nombre important de nouveaux frères.

L’ascétisme à l’épreuve des siècles

La fidélité à la Règle de saint Benoît constitue le principe fondateur de toutes les congrégations cisterciennes. Reconnaissables à leur robe (« coule ») blanche, qui leur vaut le surnom de « moines blancs », les religieux y mènent une vie d’ascète, où le silence est de rigueur et la consommation de viande interdite.

 

Prônant initialement le dépouillement matériel et rejetant le commerce traditionnel, les moines cisterciens cèdent peu à peu au développement artistique et économique. Sous leur influence, des progrès considérables sont effectués dans les domaines agricole et industriel (systèmes d’irrigation, création d’étangs, exploitation des forêts et des vignes, création de forges, etc.). Les Cisterciens reviennent ensuite à plus de sobriété et d’austérité suite au mouvement de réforme des XVe et XVIe siècles.

 

Dissous à la Révolution, l’ordre cistercien reprend peu à peu vie aux XIXe et XXe siècles en France et dans le monde, notamment avec la naissance d’un mouvement réformé : celui des moines trappistes. Aujourd’hui, la Charte européenne des abbayes et sites cisterciens, qui siège à Clairvaux, rassemble plus de 180 membres issus de 11 pays d’Europe.

 

 

 

Cellier aux moines de Colombé-le-Sec. (c) Didier GuyCellier aux moines de Colombé-le-Sec. (c) Didier Guy

 

 

La Règle de saint Benoît, principe fondateur de l’ordre cistercien

Fondateur de l’ordre des Bénédictins, Benoît de Nursie a écrit la Règle de saint Benoît au début du VIe siècle afin de guider ses disciples dans leur vie communautaire. Régissant le quotidien des moines dans ses moindres détails, ce « manuel » doit conduire à la recherche de Dieu à travers la prière, la lecture, le travail manuel, la charité, l’austérité et le silence. La Règle de saint Benoît a été reprise par de nombreuses communautés monastiques, et même imposée à tous les monastères de l’empire d’Occident au IXe siècle. Elle constitue le principe fondateur de l’ordre cistercien et, donc, de l’abbaye de Clairvaux.